COLETTE. Journal à rebours
COLETTE (Sidonie-Gabrielle).
Journal à rebours
Paris, Librairie Arthème Fayard, 1941.
[Imprimerie Firmin-Didot et Cie au Mesnil-sur-L’Estrée (Eure)]
In-8° ; 215 pp. et 1 feuillet de table non chiffré.
Un demi-maroquin marron, dos à nerfs pincés, titre or poussé au dos, filets or de mors, non rogné, un bel envoi signé de Colette, une superbe demi-reliure d'une parfaite exécution signée « LECA », un étui bordé de maroquin.
« JEAN LECA » était le relieur attitré du dernier époux de Colette, Maurice Goudeket, lui-même bibliophile.
Jean Leca (1906-1982), travailla pour quelques grands collectionneurs dont Jean Lanssade et Jacques Guérin. En 1949, il accéda au titre de Meilleur ouvrier de France. Établi comme artisan en 1954, il exerça jusqu'en 1973.
Un très bel exemplaire de cette édition originale peu commune, à grandes marges, relié avec ses couvertures éditeurs, imprimé sur papier de luxe (bleuté) vélin azuré de Voiron.
PROVENANCE : Vente de la Bibliothèque M. G. [Maurice Goudeket]. Livres de Collection, Paris, Palais Galliera, samedi 11 et lundi 13 mars 1961 par les commissaires priseurs Maurice Rheims et René G. Laurin.
Format bibliographique : 210 x 130 mm
Vendu
Tirage : L’un des 60 exemplaires Hors Commerce imprimé et numérotés sur papier vélin azuré de Voiron (n° XLI), premier grand papier.
Ce bel exemplaire est enrichi d’un bel envoi autographe signé de Colette : « Pour Yvonne de Bray de qui je suis aussi fière que si je l’avais inventée. Colette »
Yvonne Debray (1889-1954), actrice de théâtre et de cinéma parlant. Elle fut la compagne d’Henry Bataille (1872-1922). Monstre sacré des scènes parisiennes dans les années 1910 et 1920, elle débuta aux cotés de Réjane et de Sarah Bernhardt. Elle interpréta de nombreux rôles dont les œuvres théâtrales de Colette et de Jean Cocteau.
Un livre peu commun. Vingt-trois textes, tous inédits, magnifiques et essentiels à la compréhension de l’œuvre de Colette.
« Non, je ne voulais pas écrire. Quand on peut pénétrer dans le royaume enchanté de la lecture, pourquoi écrire ? [...] Il est un peu tard pour que je m'interroge là-dessus. Ce qui est fait est fait. »
Sans doute pressée par le besoin d’argent, exacerbé par les premières années de guerre, Colette réunit à la hâte divers articles parus pour l'essentiel dans Le Journal, mais aussi dans Candide, Paris-Soir, La Revue de Paris, Le Figaro et Marie-Claire entre 1935 et 1940 pour les plus récents, ainsi que différents textes parus dans des volumes à tirage limité: Affaires de cœur, Cahiers Colette, Splendeur des papillons, Le Mystère animal, Maurice Ravel par quelques-uns de ses familiers et Guirlande des années. Peu ou pas d’unité thématique entre la vingtaine de textes qui composent le recueil. Le lecteur passe de l'évocation des paysages de Corrèze - Curemonte où Colette et Maurice Goudeket se sont réfugiés après l’exode -, à ceux de Provence pour mieux retrouver ceux de la Bourgogne natale. Au salon de la princesse de Polignac succède le tribunal de Fez où on juge Oum-el-Hassen, terrible tortionnaire et meurtrière marocaine. Toutefois, on aurait tort de négliger ce recueil qui contient de véritables pépites, qu’il s'agisse de « La Chaufferette » évoquant l'absence de vocation littéraire de l'écrivain ou « Un salon en 1900 » décrivant avec une sûreté et une justesse de trait rares Gabriel Fauré et Maurice Ravel. C’est aussi dans ce recueil que se trouve une des images les plus justes décrivant la période de l'exode fin juin 1940 : « La France glissant sur elle-même ». (Cf. Frédéric MAGET)
Frédéric MAGET, est professeur de lettres modernes, auteur, spécialiste de l’œuvre de Colette, directeur de la Maison de Colette et président de la Société des amis de Colette.