Alphonse DAUDET [Henri SOMM]. Sapho
Page de faux-titre avec aquarelles d'Henry Somm. Marque estampillée de collection et signature caractéristique à l'encre noire et à la plume : " Hy. Somm. " de l'artiste, en marge inférieure, recto.
Une magnifique reliure en plein maroquin signée MERCIER successeur de CUZIN.
DAUDET (Alphonse), orné par le peintre Henri SOMM.
Sapho, mœurs parisiennes
Paris, G. Charpentier et Cie, Éditeurs, 1884.
L’ouvrage a paru sans nom d’imprimeur, sauf pour la couverture [Paris. – Imp. E. Capiomont et V. Renault, rue des Poitevins, 6].
In-18 jésus : faux-titre, page de titre et 337 pages, comme suit : 3 feuillets préliminaires contenant le faux-titre, la page de titre et un feuillet de dédicace : Pour mes fils quand ils auront vingt ans, et 337 pages, couvertures imprimées.
Avec la fameuse dédicace de l'auteur : « Pour mes fils quand ils auront vingt ans »
Une magnifique reliure d'époque à filets multiples signée Émile MERCIER.
Un plein maroquin rouge, dos à nerfs richement orné chiffré en pied, caissons dorés à cinq filets dorés et pointillés, filets dorés pointillés sur les nerfs, titre or poussé au dos, couvertures jaunes imprimées de l’éditeur conservées, dos conservé, tranches dorées sur brochure, cahiers inégaux, six filets dorés dont un au pointillé d’encadrement sur les plats, un double filet doré sur les coupes, coiffes filetées or, contreplat supérieur et inférieur en doublure de maroquin rouge décoré d'une large bordure intérieure de filets dorés et d'un rinceau doré déployé sous forme de frise, garde volante de moire rouge et garde double de papier marbré en peigné fin, une reliure d’époque signée de l’atelier « MERCIER sr DE CUZIN » (successeur de Francisque Cuzin), UN MAGNIFIQUE EXEMPLAIRE.
La superbe dorure peut également être attribuée au grand relieur-doreur Émile MAYLANDER, alors associé en qualité de premier doreur d’atelier à Émile Mercier jusqu’au décès de ce dernier en 1910.
Le signet en tissu Satin bleu de soie est présent.
Format bibliographique : 190 x 120 mm
Vendu
Provenance : Vignette ex-libris de la Bibliothèque Marcel BÉNARD (un monogramme M et un double B et lettres croisées par M, initiales entrelacées de lettres dans un médaillon).
Marcel Bénard fut un amateur, au sens précieux et raffiné du terme, un collectionneur qui ne s’intéressait ni à l’accumulation ni à l’éclat facile. Véritable lettré, il réunit un cabinet de livres choisis, des exemplaires exceptionnels voire uniques, livres à figures sur bois du XVe et XVIe siècle aux illustrés du XVIIIe et XIXe siècle.
Infra Catalogue de la vente de la Bibliothèque de M. M. B*** [Marcel BÉNARD], Paris, Drouot, Librairie Giraud-Badin & Duchemin Frères Libraires, 3e vacation : 16 mai 1925 (n° 285).
Catalogue des aquarelles, dessins aquarellés, etc. par Henry Somm dont la vente aura lieu Hôtel Drouot, salle n° 8, le mardi 10 décembre 1907, Me Gaston François, M. L. Moline Expert/Rueil.
BIBLIOGRAPHIE
PRÉCIEUSE ÉDITION ORIGINALE IMPRIMÉE SUR PAPIER JAPON IMPÉRIAL ; l’exemplaire a été orné de 72 charmantes compositions picturales signées par le peintre-caricaturiste Henry SOMM.
Tirage : L’un des 40 exemplaires numérotés imprimés sur papier Japon impérial (n° 40), seul tirage de luxe.
UN EXEMPLAIRE D’EXCEPTION, UNIQUE, IMPRIMÉ SUR PAPIER JAPON IMPÉRIAL, ILLUSTRÉ DE 36 AQUARELLES ORIGINALES ABOUTIES ET DE 36 DESSINS À LA PLUME ORIGINAUX SIGNÉS DU PEINTRE ORNEMANISTE HENRY SOMM, placés sur le faux-titre, dans les marges, en-tête, et la fin des chapitres. Marque estampillée, initiale et signature.
– Carteret, Romantique & Moderne, t. I., p. 197 : « Un des ouvrages les plus célèbres de Daudet, il est fort recherché. »
– Clouzot, Guide du Bibliophile Français, p. 81 : « Recherché même sur papier ordinaire. »
– Évanghélia Stead, Poétique du Chat Noir (1882-1897), Presses universitaires de Paris Nanterre, 2021, article : « L'art de la pointe sèche. Modeste énigmes par Henri Somm », pp. 279 à 300.
– Talvart & Place, Bibliographie des Auteurs Modernes de la Langue Française (1801-1941), t. IV, 32a, p. 22.
– Vicaire, Manuel de l’Amateur de Livres du XIXe Siècle (1801-1893), t. III, coll. 56.
Marque estampillée de collection d'Henry SOMM (Frits Lugt, Les marques de collections de dessins & d'estampes, La Haye, Éditeur Martinus Nijhoff, 1956, p. 244 (n° 1370) : violet, recto).
François-Clément Sommier, dit Henry SOMM (1844-1907), un artiste aux multiples talents, à l'humour d'avant-garde
Peintre, illustrateur, caricaturiste, aquafortiste, graveur et aquarelliste sur ses propres œuvres, né en 1844 à Rouen, mort à 63 ans en 1907 à Paris dans le dénuement. Il fut l'élève de Gustave Morin (Rouen).
Henry Somm eut son heure de succès, surtout dans les caricatures publiées dans les journaux humoristiques. Son dessin ne manquait pas d’un certain esprit. Il a laissé un nombre important d’albums d’esquisses remplis de croquis d’un mérite incontestable. Ces dessins restés inconnus font vivement regretter la part qu’il fût contraint pour vivre de consacrer aux journaux humoristiques. Ses possibilités de peintre, et de peintre de grand talent, ne trouvèrent pas à s’employer. Il n’est que juste que ceci soit affirmé. Si les dessins dont nous parlons sont un jour mieux connus, Henry Somm tiendra une place très honorable dans la « graphie » des mœurs de la fin du XIXe siècle. (Cf. : Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des Peintres, Sculpteurs, Dessinateurs et Graveurs, t. IX, p. 695).
La modestie d'Henri Somm, ainsi que son horreur des réclames tapageuses, sont pour beaucoup dans l'« absence » de notoriété (peu de gens ont reconnu en son temps ses talents de peintre) alors même que ses imitateurs et copistes furent nombeux. Selon une formule de Léon Roger-Milès, Henri Somm fut « une étincelle toute radiante, dans le champ de laquelle beaucoup de gens sont venus se pourvoir ».
- En 1891, dans le Catalogue illustré de l’Exposition de dessins, peintures, aquarelles… de la Galerie Georges Petit à Paris, le critique d'art Léon Roger-Milès (1859-1928), écrivait dans la préface : « Henri Somm est de ceux dont l’art, qui semble fugitif, est fait de qualités solides; il a le viatique qui l’empêche de disparaître ».
- Henri Beraldi (Les Graveurs du XIXe siècle) a donné un catalogue succinct de son œuvre.
Sapho, ou les misères d’une vie de femme
Sapho, s’est éprise de Jean Gaussin à peine avait-il franchi la porte du bal masqué de l’hôtel de Déchelette, rue de Rome. Le jeune homme, lui, est pris d’une grande exaltation et se laisse bercer avec complaisance dans les bras d’une belle et sensuelle femme, modèle connu dans le copurchic parisien sous le nom de Sapho*. Courtisane vieillissante, Fanny [Legrand] est éperdument amoureuse, elle s’attache désespérément à son jeune amant, l’arrache aux promiscuités et peu à peu arrive à faire le vide autour du malheureux et le contraint à vivre isolé dans un climat de vulgarité et dans le silence de l'abjection. Petit employé en faux-ménage, le timide et poltron Gaussin pense qu'il n’est pas amoureux de son « élégante » et n’a donc pas peur de ce caprice léger et aimable. Lui l'amant de Sapho, une « fille » à artistes, une « horizontale » (dans le langage imagé de l'époque) sait qu’il la quittera dans trois ans. Il sera nommé à l’étranger, loin, très loin. Cette certitude l’apaise, lui ce demi-parisien que Paris a blessé. Il peut enfin se libérer de la terrible emprise de sa maîtresse, une créature vieillie, de la brûlure de Sapho, ce nom de Sapho, piquant désir du dimanche, qui la rendait au passé.
*Sapho transpose l'histoire d'une liaison de jeunesse de l'auteur avec l’actrice Marie Rieu, alias le « collage » (le mot est de Daudet [voir p. 60, 215 et 247]), mi-grisette mi-modèle, elle plongera le jeune Alphonse dans un enfer d'amour, de misère et de jalousie. Le récit de Sapho à pour cadre Paris, sa périphérie et le sud de la France.
Daudet adaptera lui-même Sapho pour la scène. Avec Jane Hading, la pièce montera aux nues au théâtre du Gymnase en 1885.
Nous avons lu Sapho.
Dans l’orage d’un premier amour boueux, souillé, Jean Gaussin saura-t-il lutter et souffrir une agonie morale pour remporter sa première victoire d’honnêteté ?
La recherche de la vérité et la rigueur de l’analyse caractérise ce beau roman d'un implacable réalisme et au vocabulaire concret, l’un des meilleurs de la seconde moitié du XIXe siècle.
Bouleversant. À lire absolument.
Les bonnes feuilles
« Ses cinq ans de Sapho n’avaient pu le pétrir encore à ce point ; mais son corps gardait pourtant les marques de la chaîne, en subissait le lourd entraînement. Et de même que, plusieurs fois, ses pas l’auraient tout seuls dirigé vers Chaville au sortir de son bureau, il lui arrivait le matin de chercher à côté de lui sur l’oreiller les cheveux noirs en nappes lourdes, démordus de leur peigne, où tombait son premier baiser. » (Voir p. 289).